La civic tech constitue un écosystème de services et d’outils numériques ayant pour objectif de renforcer l’engagement et la participation citoyenne et démocratique. Un foisonnement de dispositifs et de solutions ont émergé depuis une dizaine d’années : outils de gestion de la relation aux citoyens, applications pour évaluer et contribuer aux politiques publiques, plateformes de pétition en ligne, sites de consultation, les initiatives sont variées tant dans leurs moyens que dans leurs finalités.
Pour ses promoteurs, les bénéfices de la civic tech sont multiples :
- contribuer à une meilleure information des citoyens,
- améliorer la transparence des institutions,
- favoriser l'émergence de nouvelles collaborations entre citoyens et institutions,
- faciliter la mobilisation de l’opinion publique,
- participer au développement d’outils pour améliorer la qualité du débat public et encourager la participation citoyenne.
L’objectif final ? Élargir considérablement le nombre de citoyens impliqués dans la décision publique afin d’améliorer son efficacité.
Le Grand Débat National a permis de tester à l’échelle du pays une concertation reposant sur des dispositifs numériques - une plateforme en ligne recueillant avis et propositions - et des dispositifs physiques - des cahiers de doléances, des débats locaux, des conférences citoyennes. La plateforme en ligne a recueilli près de 2 millions de contributions ce qui peut être considéré comme un succès.
Toutefois les marges de progrès sont encore importantes. Dans son cahier intitulé Civic Tech, données et Demos (2019), la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) note que les organisateurs du Grand Débat auraient dû demander plus d’informations aux participants pour pouvoir évaluer leur représentativité. Le manque d’informations sur les participants a empêché toute authentification et a permis à des groupes d’intérêts de détourner en partie la consultation de ses objectifs initiaux.
A l’échelle locale, l’impact des civic tech sur les projets portés par les autorités publiques est concret et visible. La tendance la plus marquante de ces dernières années est probablement le développement des budgets participatifs. Les options pour mettre en place un budget participatif sont nombreuses. A Angers, la ville a par exemple choisi un système hybride entre du présentiel et du numérique pour son budget participatif (enveloppe d’1 million d’euros annuel).
Côté numérique, la ville s’est appuyée sur la plateforme Decidim, basée sur les principes de l’open source. L’accès libre au code source permet d’analyser les mécanismes fonctionnels et algorithmiques de la plateforme, ce qui constitue un gage de transparence sur les méthodes d’analyse et d’exploitation des données. Côté présentiel, la mise en oeuvre du budget participatif s’appuyait sur 22 bureaux de vote ainsi que sur une “agora” qui a permis aux porteurs de projets candidats de présenter leurs initiatives pendant trois week ends. Ces espaces de débats permettent d’enrichir la consultation mais également de cadrer davantage les projets proposés.
Si les civic tech constituent une opportunité pour toucher des publics qui n’ont pas nécessairement le temps de s’impliquer dans la vie politique du territoire les coupler avec un dispositif d’animation semble aujourd'hui essentiel pour plusieurs raisons.
Seul, un dispositif numérique exclut une partie de la population. Selon la Mission Société Numérique, 13 millions de Français demeurent éloignés du numérique : ils n’utilisent pas ou peu Internet, et se sentent en difficulté avec les usages. Parmi eux 6,7 millions ne se connectent jamais à internet. Dès lors quelle valeur accorder à la participation en ligne quand une partie de la population ne peut y contribuer ? Ainsi pour n’exclure personne, il est indispensable de proposer des dispositifs de démocratie participative reposant à la fois sur le numérique et sur le présentiel.
Enrichir le débat : les rencontres permettent l'organisation de temps d’échange qui sont propices à la co-construction d’idées nouvelles. Ces temps permettent aussi bien aux politiques de clarifier leurs ambitions pour le territoire qu’aux citoyens d’exprimer leurs attentes et leurs besoins. Aussi, ces temps permettent de créer des espaces de réflexion ouverts, faisant émerger de nouvelles solutions sur la base sur la base de l’intelligence collective.
Par ailleurs, il est nécessaire de considérer ces temps présentiels comme des espaces de médiation, au cours desquels chacun peut exprimer sa démarche et en faire la pédagogie. Ce partage permet de favoriser l’adhésion à un projet tout en testant sa pertinence sur le terrain. Enfin, ces temps d’échange en présentiel et les réflexions qui y sont formulées peuvent être capitalisés sur la plateforme en ligne et portés à la connaissance d’un public élargi, ce qui renforce les synergies entre le numérique et les réunions “traditionnelles”.
Les outils de civic tech collectent des données sensibles, dont l’utilisation est encadrée par le règlement européen sur la protection des données (RGPD). Les civic tech font face à des impératifs contradictoires : d’une part il faut préserver l’anonymat des participants pour garantir leur liberté de vote mais de l’autre il faut collecter suffisamment d’informations pour être certain que la consultation en ligne n’est pas préemptée par un groupe d’intérêts peu représentatif de la population.
De même pour simplifier l’accès aux dispositifs de démocratie participative en ligne, les autorités peuvent être tentées de proposer des identifiants simples tels que Facebook Connect ou Google Connect qui, s’ils sont mal configurés, permettent à des sociétés de collecter des données très sensibles.
Une piste pour répondre aux enjeux relatifs aux données personnelles consiste à promouvoir la gestion décentralisée des identités et l'usage de tiers de confiance. Cela permettra au commanditaire d’une consultation d’authentifier les participants sans les identifier.
De nombreuses startups ont investi le champ de la démocratie participative et proposent des outils novateurs pour dynamiser l’action publique locale. Tactis propose d’accompagner les autorités publiques dans leurs projets Civic Tech afin qu’elles soient en mesure de procéder à des choix éclairés durant toute la phase de mise en oeuvre de leur projet : définition des besoins, élaboration de la stratégie, rédaction du cahier de clauses techniques et particulières, suivi et évaluation des solutions mises en oeuvre, conditions de mutualisation de ces outils entre plusieurs échelons territoriaux...
Sources externes utilisés pour la rédaction de l’article :
https://www.cnil.fr/fr/civic-tech-donnees-et-demos-une-exploration-des-interactions-entre-democratie-et-technologies
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2016/10/25/civic-tech-vers-une-boite-a-outils-de-la-democratie-numerique_5019800_4408996.html
https://www.courrierdesmaires.fr/80770/le-budget-participatif-dangers-retour-dexperience
Une question sur la civic tech ? Besoin d'une levée de doute en vue d'un futur projet ? Envoyez un email à Nicolas Potier, directeur associé Tactis.